Une technique employée par les commerçants consiste à dissimuler les exportations de bois de rose dans des cargaisons de vanille, l’une des exportations légales les plus lucratives de l’île. Le négociant en bois de rose qui s’est entretenu avec des reporters clandestins a suggéré précisément cette méthode, recommandant le recours à un exportateur d’épices appelé Girovani.
Il a expliqué que lorsque le bois était expédié, “[la valeur de] la cargaison serait étiquetée comme “frais de vanille et de service élevés” sur le formulaire douanier d’exportation et que la vraie vanille serait insérée dans la cargaison.
Interrogé, Girovani a nié toute implication dans le commerce du bois de rose, décrivant toutes les allégations comme “entièrement fictives” et a déclaré que “la marchandise elle-même n’existait pas”.
Mais dans une lettre, Girovani avait en effet confirmé le conseil du commerçant: “Nous déclarons que nous pouvons assurer l’exportation des marchandises … sous l’étiquette officielle de la vanille”, indique le communiqué. “Le produit réel expédié au client sera, bien sûr, celui qui sera discuté par courrier [bois de rose].”
Plus de 70% de la vanille du monde provient de Madagascar, et la majeure partie de celle de la Sava. Les colonisateurs français ont planté des vergers qui approvisionnent aujourd’hui les chefs, les restaurants et les confiseurs du monde entier.
Les “actes de Dieu” qui ont balayé les forêts de l’île n’ont pas épargné ses plantations de vanille. La “crise de la vanille” à Madagascar a fait la une des journaux internationaux et, selon les médias, le prix moyen du kilo de gousse de vanille est passé de 20 à 600 dollars. Sa valeur sur le marché international se rapproche désormais de celle de l’argent.
Comme dans le cas du bois de rose, les bénéfices de la vanille reviendraient à un groupe d’hommes d’affaires, et non aux agriculteurs qui les récoltent.
Les négociants en bois de rose ont déclaré aux journalistes que certains passaient maintenant du bois de rose stocké au commerce tout aussi lucratif mais moins risqué de la vanille.
Mais les deux entreprises ne sont pas vraiment séparées, comme le précise une lettre du président Rajaonarimampianina.
Dans un document, Rajaonarimampianina – alors ministre des Finances – demande au directeur de l’Association des banques professionnelles de Madagascar de rouvrir les comptes fermés des négociants et financiers illégaux de palissandre de la région de la Sava, mettant en garde sur les “conséquences désastreuses” pour l’économie locale autrement.
Il explique que “la majorité [des négociants en bois de rose] sont également des exportateurs de vanille et contribuent de manière significative au financement de la récolte à chaque saison”.
Le blocage de leurs comptes tuerait le commerce de la vanille, écrit-il, concluant qu’il serait reconnaissant que les banques “restituent les comptes bancaires nécessaires aux activités [des financiers du bois de rose]”.
En substance, sa lettre admet que les intermédiaires dans le commerce de la vanille sont eux aussi profondément ancrés dans le bois de rose illégal.
“On ne peut pas dire si l’argent provient de la vanille ou du bois de rose, car il est mélangé”, explique le négociant avec le stock de bois de rose de 200 tonnes. “La plupart des trafiquants de bois de rose” étaient impliqués dans les deux métiers.
Ce n’est donc pas un hasard si Maurice, la destination présumée d’une grande partie des exportations de bois de Madagascar, est également une destination de transit majeure pour la vanille.
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